25 décembre 2014 Partis de Dakar vers 17 heures avec Karamba Bayo, le directeur de l’école de Roffangué, nous avons navigué tranquillement la nuit. Nous avons dû tirer un bord vers le large au petit matin pour ne pas arriver de nuit devant le Saloum. Karamba avait prévenu le village de notre arrivée. Une pirogue est venue nous chercher et nous y avons chargé les cartons de fournitures scolaires achetées à Dakar. Nous avons débarqué entourés d’une foule d’enfants et l’accueil a été exceptionnel: tout le village était là, les femmes jouaient du tamtam et dansaient. Au Sénégal, tout est prétexte à faire la fête! Les femmes nous ont fait danser… Même Eric s’y est mis, lui qui déteste ça! J’ai fait un petit discours traduit par le fils de l’Imam, puis nous sommes allés visiter la case de santé, guidés par Oumy la matronne. Nous sommes ensuite rentrés au bateau, un peu sonnés. Un autre monde s’ouvre à nous! Il nous faut nous adapter!
UN DIMANCHE DE DECOUVERTE A ROFFANGUE Le lendemain matin, nous avons débarqué avec notre annexe. Une grappe d’enfants nous a tout de suite accueillis pour nous aider à traîner l’annexe. Ils sont curieux et ne voient jamais des enfants blonds comme nos trois gars! Ils ne cessent de demander: « comment tu t’appelles? » Pour les plus jeunes, ce sont les seuls mots de français qu’ils connaissent. En effet, l’école « française » ne commence qu’au CP. Dans les familles, on parle le sérère. Les enfants apprennent le français en même temps qu’ils apprennent à lire… Ce qui fait qu’arrivés en CM2, ils commencent en général à le maîtriser à peu près. Nous allons jusqu’à l’école où nous retrouvons Karamba et Moody qui nous font visiter: un bâtiment complètement délabré qui n’est plus utilisé actuellement, un autre dans un état inimaginable pour nous, mais qui est utilisé actuellement et qui contient deux classes. Un troisième, neuf mais pas fini, qui sert pour la troisième classe. Les latrines sont délabrées et inutilisables. Les enfants vont faire leurs besoins dans les fourrés autour de l’école. Il y a un récupérateur d’eau de pluie dont le robinet ne fonctionne pas et qui n’est donc pas utilisé. Il n’y a pas vraiment de cour. Les chèvres, les poules se promènent autour des bâtiments. Des détritus traînent partout. Nous nous y attendions, mais cela fait tout de même un choc!
LUNDI STUDIEUX Le lundi matin, nous sommes allés rendre visite aux élèves dans les classes et assister à quelques leçons. C’est vraiment intéressant. Dans la classe d’Aissatou, ce sont les CI-CP. Les élèves apprennent à parler français, à écrire, à lire et à compter. Dans la classe de notre ami Karamba, ce sont les CM1-CM2. Ils commencent à bien parler le français pour la plupart. Ils préparent leur certificat de fin d’étude, ils ont un peu « la pression ». L’ambiance est très sereine, ils sont très studieux. Une « association des élèves » est organisée, avec président, président adjoint, trésorier, trésorier adjoint, secrétaire, secrétaire adjoint, pour leur apprendre la solidarité et l’organisation collective. La séance se termine par des chansons et certains se lancent même à danser… Dans la classe de Moudy, ce sont les CE1-CE2. Maël assiste à ses leçons. Au début avec beaucoup de réticence -on aurait même pu parler d’un blocage-, mais dès le deuxième jour, ce sera un vrai bonheur : tellement fier d’avoir réussi à surmonter ses difficultés! Maël lève le doigt comme les autres pour participer. Moudy a été très attentionné pour l’intégrer, et cela à très bien fonctionné, nous l’en remercions beaucoup!
MARDI OFFICIEL Rendez-vous est pris à Foundiougne pour rencontrer l’inspecteur de l’IEF* et faire la remise officielle de l’ordinateur et du vidéo-projecteur (U3M).« Anao » a fait la « pirogue-courrier » jusqu’à Foundiougne, et pendant qu’Eric et les gars allaient au marché, je suis allée rencontrer l’inspecteur avec Karamba. Intéressant d’observer l’Education Nationale d’un autre pays! J’ai fait un beau discours à l’inspecteur et il m’a rendu la pareille. Je suis totalement néophyte en terme d’humanitaire, cette mission VSF est notre première expérience dans une ONG, mais je tente tout de même de jouer les ambassadeurs en me mettant dans le ton de l’éthique de VSF. Pas simple! Puis nous sommes allés à une réunion d’information sur le certificat de fin d’étude. C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai joué les observatrices! Les instituteurs sont envoyés loin de chez eux, dans des villages qui n’ont pas la même langue maternelle qu’eux, dans des conditions extrêmement rustiques, ils vivent chez l’habitant, ils font la classe avec des moyens insignifiants, et ils ont un réel souci de la réussite et une grande conscience des difficultés de leurs élèves, une vraie volonté de travailler avec les parents (qui ne parlent pour beaucoup pas français et ne sont pas tous convaincus de l’intérêt de l’apprendre!) Ils me font vraiment penser à nos « hussards de la république »!
*Institut de l’Education et de la Formation
FIN DE SEMAINE TRANQUILLE Nous avons poursuivi la semaine à Roffangué: Eric allait chercher le pain, nous déjeunions, puis Maël allait passer la matinée à l’école. Nous avons découvert le village un peu plus en profondeur, discuté avec les pêcheurs, observé les dames faire la cuisine, partagé des recettes, fait des crêpes aux enseignants, expérimenté la recette du mafé, observé le charpentier construire une pirogue, rencontré le Chef du village, l’Imam, les représentants des parents d’élèves, monté un petit film sur le village pour le présenter un soir et tester le vidéo projecteur: cela a été tout un poème! En effet, il n’y a pas d’électricité. Il faut donc trouver un groupe électrogène qui fonctionne, une batterie, acheter de l’essence… Mais rien ne marche du premier coup! Tout le monde patiente. Et finalement, quand les villageois se sont vus à l’écran, cela a été de grandes émotions!
Nous avons un rôle d’ambassadeur de VSF. Nous discutons à plusieurs reprises des besoins, nous faisons un bilan de l’état des installations dans l’école et nous dressons une liste avec le directeur des travaux à effectuer. Nous la transmettrons à VSF pour faire avancer les décisions et des éventuels financements. Nous observons en même temps que l’école travaille avec plusieurs ONG, le directeur lance des projets pour obtenir des financements: c’est une espèce de recherche de sponsors! Comme nous sommes totalement débutants en la matière, nous avons du mal à y voir clair. Nous ne sommes ici que les yeux et la voix de VSF.
Puis nous avons quitté le Saloum le coeur gros. Maël a pleuré à s’en faire éclater le coeur! Karamba aussi était triste. Il était comme chez lui dans notre bateau. Nous avons vraiment sympathisé. Pierre était son « petit prince »! Il nous a dit que jamais une famille dans un bateau n’était restée mouillée plusieurs jours devant le village comme nous l’avons fait. C’était une première! Cela fait drôle! Cela a été une expérience très forte. Pas facile tout le temps, mais très forte! Jeanne, Eric et leurs 3 enfants à bord d’Anao